Décryptage

5 min

Korian, précurseur sur le dispositif Transitions collectives

Alors que le dispositif « Transition collectives » a été officiellement lancé en janvier 2021, certaines entreprises telles que le Groupe Derichebourg ou Monoprix l’ont déjà adopté et les formations pour l’entreprise cible Korian ont même débuté. Un démarrage que nous relate Nadège Plou, DRH France de Korian.

Aide-soignant, un métier en forte demande

Korian est une société de 26 000 salariés spécialisée dans les métiers de la santé, de la réadaptation fonctionnelle et psychiatrique ainsi que l’aide aux personnes âgées (EPHAD). Un secteur d’activité ayant de grands besoins en termes de recrutement et qui est souvent confronté à la pénurie de talents : Korian embauche 5000 personnes en CDI par an, dont 2500 aides-soignants. Cette pénurie peut s’expliquer par le système d’enseignement, puisque seuls les IFAS – instituts spécialisés dont les places sont contingentées – peuvent former des aides-soignants.

Face à cette situation, l’entreprise s’est donné les moyens de former ses propres équipes par le biais de VAE, en créant, il y a 15 ans, la Korian Academy. Ainsi, ce sont près de 400 agents de service hôtellerie de niveau 1 qui sont formés chaque année au métier d’aide-soignant.

Un autre frein à la formation sur ce secteur est le système d’apprentissage, peu développé. « Quand je suis arrivée, en 2017, nous avions 35 apprentis aides-soignants pour 22000 salariés ! Une hérésie de manière générale, mais d’autant plus pour des métiers où l’humain et les qualités personnelles sont essentiels. Nous avons œuvré avec l’aide de l’État pour faire évoluer ce chiffre : 500 places d’apprentis vont être ouvertes cette année et environ 700 l’an prochain », explique Nadège Plou.  

Une alliance pour l’emploi

Pourtant, lorsque l’on met ces chiffres bout à bout, force est de constater que cela ne suffit pas à pouvoir l’ensemble des postes ouverts. Les équipes de Korian ont donc eu l’idée, il y a quelques années, de s’appuyer sur d’autres entreprises, dans différents secteurs, pour trouver des profils à former. Une démarche longuement réfléchie, rendue concrète le 15 janvier dernier lors de la mise en place du dispositif « Transitions collectives ».

C’est ainsi que Korian s’est rapproché de Derichebourg et Monoprix avec pour maître mot la transparence. Korian a présenté ses statuts sociaux, grilles de rémunérations, conditions de travail et d’évolution ainsi que ses valeurs, tandis que Derichebourg et Monoprix négociaient leurs accords de GPEC et identifiaient les emplois fragilisés au sein de leur organisation. Ensemble, ils ont étudié les compétences transférables dans les différentes équipes, avant de s’engager dans une procédure TransCo. « Nous avons choisi des entreprises qui partagent nos valeurs. D’ailleurs, c’est intéressant de voir que certains salariés concernés ont déjà tenté de passer des formations d’aides-soignants. Ensuite, l’accord avec les différents partenaires sociaux est essentiel dans le processus et enfin, l’implication des salariés souhaitant nous rejoindre est, finalement, la clé de la réussite », raconte Nadège Plou.

Une opportunité autant qu’un choix

Pour Korian, le processus de mise en place de TransCo intègre une étape supplémentaire.

  • Étape 1. Travail amont avec Derichebourg et Monoprix pour étudier la compatibilité du projet
  • Étape 2. Préparation des réunions collectives avec les salariés, animées avec l’aide de Transition Pro et de l’opérateur de Mon CEP régional, Avenir Actifs
  • Étape 3. Une semaine de « sas d’orientation » puis, après un temps de réflexion, validation par un Conseiller en évolution professionnelle du Groupement Évolution de la volonté d’adhésion au dispositif Transco et du choix du projet.
  • Étape 4. Dépôt de dossier de financement auprès de Transitions Pro par l’opérateur de Mon CEP Groupement Évolution
  • Étape 5. Entrée en formation

L’étape 3, appelée « semaine de sas d’orientation » est tout à fait propre à l’entreprise et c’est peut-être ce qui garantira son succès. « Nous ne voulons pas former pour former. Pour réussir dans ce métier, les qualités personnelles sont aussi importantes que les compétences, voire plus, car les compétences s’enseignent. Avant de lancer TransCo, nous organisons une semaine de présentation de nos métiers, nos valeurs, nos besoins en compétences techniques, nos contraintes et nos salaires aux salariés identifiés. Puis, nous leur faisons rencontrer des professionnels sur le terrain. Ces rencontres sont le point de bascule, l’élément déclencheur de décision. À la fin de cette semaine, le salarié et les équipes de Korian décident ou non de tenter l’expérience.  Une semaine cruciale car lorsque l’apprenti nous rejoint pour ses 14 mois de formation, il le fait en pleine conscience et cela se ressent sur sa motivation », explique Nadège. Rappelons que lorsqu’un salarié s’engage dans une formation via TransCo, il est libre de réintégrer son entreprise à tout moment. Cependant, comme le rappelle Nadège Plou, « le vrai risque n’est pas d’engager des frais de formation mais de ne pas pourvoir les postes vacants en raison de la pénurie d’aide soignants diplômés d’état». Un risque pour les résidents et  patients autant que pour le personnel, très sollicité que nous ne souhaitons pas prendre.

L’anticipation : une clé de réussite des transferts de compétences entre secteurs

« TransCo n’est pas un dispositif anti-crise. C’est un outil qui permet de gérer les effectifs à froid. Il fonctionne également pour les métiers menacés par les transformations à venir, notamment la transformation digitale. D’ailleurs, la circulaire du 15 janvier entamait un travail prospectif puisque les entreprises en PSE ne peuvent pas en bénéficier », précise Nadège.

C’est pour cette raison que Monoprix et Korian se sont facilement joints à cette démarche. « En effet, Monoprix a l’intelligence d’anticiper les changements des métiers de caisse de façon sereine et optimale, en accord avec les partenaires sociaux. Cela fait trois ans que la marque conduit des réflexions avec ses salariés sur les compétences transférables lors des entretiens annuels. Début 2021, ils avaient déjà identifié 800 personnes intéressées par les métiers de l’aide à la personne ».

« Bien que nous soyons les premiers à avoir mis en œuvre le dispositif sur les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et des Yvelines, notre mécanique fonctionne plutôt bien. Mais, cela s’est fait du jour au lendemain et de façon autonome. Nous avons participé à la mission sur l’attractivité des métiers du grand âge confiée à Madame Myriam El Khomri. C’est là que nous avons compris l’importance de créer des ponts entre les secteurs. Nous étions alors en octobre 2019. L‘équipe pédagogique de la Korian Académy a œuvré pour pouvoir prendre en charge des personnes dont ce n’était pas le métier initial. Enfin, nous sommes entourés de personnes qui partageaient le même objectif et la même dynamique tels que les représentants de l’association INVIE, le Cabinet Conseil Siaci Saint Honoré ainsi des conseillers de l’opérateur Mon CEP Groupement Évolution qui aident à la mise en place du dispositif. C’est en réalité le fruit d’années de travail », précise Nadège Plou.

 

 

 

En mai dernier, Korian intégrait donc sa première promotion de 11 salariés venus de Derichebourg et vient d’accueillir plus de 60 salariés de Monoprix. Des effectifs qui devraient bientôt grossir puisqu’à ce jour, une centaine de personnes souhaitent intégrer le programme. Prochaine étape pour Korian : travailler à l’échelle du territoire avec des PME.  Les salariés qui ne peuvent pas intégrer les formations sont, eux, suivis dans le dispositif Transco par l’opérateur de Mon CEP Groupement Évolution pour définir un projet professionnel et orienter vers les formations nécessaires.

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